Existe il des critères objectifs qui définissent une mauvaise compétition? 3/3

•Anglet « full distance » 4.2km, où le syndrome de la course locale que l’on veut soutenir mais…

C’était en aout 2021 que la première édition d’une course dont j’entendais parler mais qui laissait peu de traces sur le net prenait place dans mon calendrier. Nous étions en mode pass-sanitaire (pas demandé lors de l’épreuve, pas plus qu’une licence ou une pièce d’identité, n’importe qui aurait pu nager) et je sortais de chimiothérapie et malgré la saison estivale j’allais nager en néoprène car j’avais parfois froid en piscine. 

Bref je ne partais pas pour une performance mais pour un 4km en ligne droite pour soutenir cette initiative et me remettre à nager. Le nom de « full distance » aurait du éveiller mon instinct et me faire renoncer, mais parfois on veut bien faire, et, la naïveté reprend le dessus, on veut laisser sa chance à une organisation locale qui parait bienveillante. Mais être gentil ça n’est pas un métier et en matière de sport le non respect des athlètes et des règlements devrait être une ligne rouge à ne pas franchir.

Car le jour J on découvre qu’il y a aura un départ et une arrivée sur la plage (malheureusement) mais surtout une sortie à l’australienne. 

Cela mérite peut être que je m’attarde sur le terme qui est propre au triathlon même si personne ne se souvient vraiment le lieu plus précisément ni la date de cette innovation technique qui consiste à faire faire 2 boucles d’une même distance à des nageurs et des les faire sortir de l’eau et courir sur la plage pour marquer le passage entre la première et seconde boucle.

Cherchez Charlie au milieu des néoprènes une tendance trop courante dans l’eau libre.

Certaines épreuves d’eau libre auxquelles j’ai participé ont été jusqu’à me proposer de nager 6km en sortant tous les kilomètres pour faire 6 boucles. Ma sortie à la première boucle fut une sortie définitive pour ma part, il y a une limite à la rigolade surtout aux dépens des nageurs.

Et en l’occurence il n’y a aucune autre raison à chercher ici que le fait que l’organisateur soit lui même un triathlète et qu’il justifie cela par un « spectacle à assurer sur la plage au 2km ». 

Je vous rappelle qu’on aurait pu nager paisiblement en ligne droite à 200-300m du bord et que cette sortie nous faisait juste couper un effort en plein milieu pour 20 spectateurs et organisateurs à tout casser. Rajoutons ici que les règlements d’eau libre prévoient ce cas de figure mais limite, d’une part la partie hors de l’eau à 1% de la distance totale, en précisant que la ligne d’arrivée doit être à 10m maximum de la rive et que la sortie à l’Australienne, d’autre part, ne peut excéder 15m. On en était loin ce jour là. Pour un nageur, qui, alors ne peut pas courir c’est un enfer mais pour la discipline c’est un bon nivellement par la bas. 

Quand la course locale ne dispose pas d’affiche, de briefing ou de juge arbitre allait voir au rayon « horreur ».

Mais, revenons à mon épreuve « full distance » qui ne pouvait pas le jour J faire les 4.2km annoncés car une compétition de surf avait lieu sur la dernière partie de la course et, au Pays Basque, s’il n’y pas (encore) de culture de l’eau libre, celle du surf, est bien présente. Les nageurs devaient donc finir sur la plage précédente, et, de fait, nager uniquement 3.5km. Malgré tout l’organisateur nous jurera jusqu’au départ qu’il s’agissait bien d’eau libre, et, que la distance serait respectée. Ce sera notre seul briefing d’ailleurs.

Je rappelle qu’en eau libre si un nageur peut bénéficier des pieds d’un autre nageur il ne peut pas le toucher d’une part mais surtout si son poisson pilote décide de s’éloigner le second ne peut plus alors lui coller le train, sauf à prendre un carton par le juge arbitre. 

Et en matière de stratégie de course ça fait une différence si le drafting d’une part est donc autorisé comme il l’est en triathlon et que la distance est en fait plus courte de 20%. Car malgré l’impossibilité de nager en direction des bouées que nous ne voyions pas, masquées par la houle, sur ce parcours mal foutu du fait de la sortie à l’australienne qui n’était là que pour « allonger artificiellement la distance », et, à défaut de bateau nous ouvrant la voie nous n’avons nagé que 3500m maximum. Le reste étant de la course à pieds qui je le rappelle ne doit jamais être pris en compte dans la distance annoncée.

Imaginez la même chose sur une course de trail ou sur route où au détour d’un virage vous comprenez que c’est l’arche l’arrivée, et tant pis pour les 2 à 3km qui restaient dans votre esprit, et sur le papier, pour faire la différence avec vos rivaux. Un comble quand le nom de l’épreuve est, je le rappelle, « full distance ».

Signalons que j’ai pu terminer deuxième de cette farce tout d’abord parce que le nageur finissant vraiment deuxième refusera de passer la ligne d’arrivée (une première pour moi mais pour vous dire le niveau de l’organisation). Et que le groupe affûté dans lequel je nage ne collabore pas et se tape dessus (littéralement) et ne varie jamais sa fréquence de coups de bras qu’il soit face ou dos à la houle. 

Donc lorsque je comprends qu’après 3000m et un peu plus nous sommes déjà arrivés et que je m’étais résolu à nager derrière ce paquet de guerriers faute d’énergie suffisante pour me détacher vraiment en pensant qu’on devrait nager plus de 4km. J’accélère avant la dernière bouée et puis je me laisse porter par la houle pour rentrer en bodysurf et mettre 50m à mes concurrents sans avoir besoin de courir sur la plage, de toute façon je refuse habituellement de le faire.

Nous sommes là en face de gens que l’on pourrait croire bienveillants en voulant développer l’eau libre, mais qui le plus souvent n’y voit qu’une opportunité de faire rentrer de l’argent sur le dos de nageurs qui ne diront rien et de triathlètes qui pourront se vanter dans ce cas précis d’avoir nagé « 4200m » en moins d’une heure. Ces organisateurs ne connaissent rien à la discipline alors que, malheureusement pour eux, les règlements existent, les moyens pour bien organiser et sécuriser une course aussi, et ignorer tous ces éléments ne va jamais aider à construire ou consolider une discipline souvent méconnue je l’admets en France mais qui est malgré tout constituée et organisée. 

Que c’est moche de devoir courir ainsi en eau libre surtout sur une sortie à l’australienne

Elle doit paraitre « bankable » pour qu’autant d’organisations se moquent de nous et nous traitent de la sorte.

D’ailleurs cette course locale m’en rappelle quelques autres dont le défi Monte Cristo qui chaque année augmente son nombre de participants et ses frais d’inscription sans pour autant améliorer la qualité de ses prestations. On y retrouve de nombreux nageurs en néoprène qui vont souffrir de la chaleur une fois déposés sur le rocher sans toilette où ils devront attendre longtemps que le départ puisse avoir lieu tellement il y a de monde à faire débarquer sur l’ile. 

Et l’année dernière, pur ce qui concerne les traversée, on ne peut pas dire que la « Catalina Channel » ait reçu des commentaires élogieux de la part du peu de nageurs ayant pu boucler la traversée dans des conditions difficiles certes mais où ils furent sortis de l’eau dans la plus grande confusion.

Cela ne va pas dans le sens du développement serein et sain de notre discipline. Alors désormais si les critères suivants ne sont pas à minima pris en compte fuyez les :

•Prix d’entrée raisonnable

•Distance annoncée réaliste et vérifiée

•Parcours cohérent, pas de sortie à l’australienne si ça n’apporte rien et de la ligne droite plutôt que de la boucle sans fin dès que c’est possible.

•Respect des règlements pour le port du néoprène, du drafting, de l’arrivée sur la plage et autres port de la montre ou de bijoux

•Classement séparant les néoprènes, venus pour s’entrainer pour un ironman®, des nageurs désirant participer à une compétition d’eau libre.

•Sensibilisation accrue au risque d’hyperthermie les jours de chaleur où certains veulent tout de même porter du néoprène.

•Toilettes et vestiaires au départ

•Ravitaillement digne de ce nom

•Préoccupation environnementale pour ne pas laisser de déchets dans l’eau ou sur le site.  

•Briefing digne de ce nom résumant le parcours, le réglement et les consignes de sécurité.

•Pilotes dignes de ce nom, bateaux équipés en conséquence et 

•Dispositif de sécurité adaptée sur et hors de l’eau, inutile de tout parier sur un kayak ou sur un restube.

•Conditions d’annulation ou de fin de course précisées et claires pour tous les acteurs.

•Conditions de remboursement le cas échéant en cas d’annulation de la course.

•Obligation pour tous les nageurs d’avoir une licence FFN en ne reconnaissant plus celle de la FFTri comme ce fut le cas en 2018 pour l’athlétisme.

Et pour le nageur l’obligation d’être bienveillant envers les autres nageurs quelque soit le niveau, mais aussi envers l’organisateur. Ce dernier peut avoir à ajuster sa compétition en fonction de facteurs nouveaux (météo, visibilité ou température de l’eau, nombre de participants) ou encore parce qu’il fait face à un évènement qu’il avait mal ou pas anticipé. Alors le dialogue avec les nageurs peut aider grandement à l’amélioration de l’organisation  à l’avenir et dans tous les cas à l’acceptation par tous que ça n’est qu’un sport.

Et, plus notre identité sera forte, plus ce sport pourra s’exprimer dans toute sa diversité, dans tous les milieux et sur toutes les distances y compris aux championnats du monde où la FINA retire l’épreuve du 25km, mais c’est un autre débat que nous aurons bientôt. En attendant nous aborderons les organisations qui savent vous faire nager et partager un bon moment dans et hors de l’eau pour finir sur une note moins salée, dans le prochain épisode 3 compétitions à faire absolument selon moi.

Existe il des critères objectifs qui définissent une mauvaise compétition? 2/3

• La traversée du Lac Léman LGSA classic (dans sa largeur et ce fut long) 

Si vous avez aimé l’Italie, vous aimerez la Suisse et à défaut d’alcool vous pourrez boire une bouteille d’Evian à l’arrivée pour accompagner la cuillère de salade de lentille et quelques bouts de pain après 13km et plus à négocier la route avec des kayaks qui ne savent pas où aller.

Voilà à peine deux semaines après Capri je me souvenais que je m’étais engagé un an avant le Covid sur cette traversée que je n’avais pas du tout prévue dans mon calendrier 2022

Heureusement il ne s’agit pas d’une course mais d’une traversée par groupe de niveau, les plus lents partent les premiers et les autres dans l’ordre de leurs allures toutes les demies heures. 

Notez bien que l’enjeu n’est pas compétitif mais qu’il y a tout de même, 13km à nager, un marquage des nageurs avec des tatouages, un chronomètre et un classement à défaut de convivialité, de rencontre et d’organisation.

Et effectivement en réalité on se rapproche beaucoup de nos amis italiens avec un briefing du même tonneau la veille au soir avec des diapositives pour faire sa navigation ce qui rappel de mauvais souvenirs et qui fait naitre chez votre serviteur l’idée qu’il existe bien des critères pour définir une traversée mal organisée. La suite me donnera raison.

Au départ tout le monde a le sourire mais porte souvent du néoprène par cette chaude journée d’été de 2020, en 2022 il en était de même

J’appartiens donc au groupe le plus rapide (prévoyant de nager autour de 1’30/100m) partant le cinquième et dernier de Suisse pour rallier Evian en ligne droite. Mais à mon arrivée sur la plage j’assiste au départ du deuxième groupe puis de tous les autres jusqu’au mien et malgré ma prise de contact avec l’organisation tous ces nageurs ne partent pas du tout en direction d’Evian. 

Les facteurs de cette erreur sont multiples et simples. Les nageurs débutants ne savent pas forcément naviguer d’une part, c’est peut être même leur première fois en eau libre et sur une telle distance, on ne voit pas les bouées situées à plus de 2km les unes des autres, et, ils font confiance aux kayaks ou aux autres nageurs. Le biais de confirmation classique, si je suis perdu les autres eux doivent savoir où ils vont, sauf si les autres pensent la même chose que moi. 

Et je confirme que les kayakistes, eux, ne savaient pas du tout où aller et de toute façon regardaient les nageurs pour les « sécuriser » et pas du tout pour les guider.

Tout ce petit monde s’entraine hors du parcours lentement mais surement. Le groupe suivant prenant comme repère le précédent et ainsi de suite. Telle une unité d’artillerie qui viserait l’arbre en boule pour toucher au but un ennemi qu’on ne voit pas. Notre groupe décidait de partir bien plus dans l’axe en fixant un sommet plus facilement repérable qu’un arbre, qui nous indique d’ici l’aplomb du point d’arrivée, selon les diapositives.

La navigation était relativement facile à faire du fait des sommets remarquables à viser tout au long des 13km, jusqu’à ce que les kayaks s’en mêlent.

Si dans les premiers kilomètres tout se passe bien, coopérant avec un nageur italien et sans prendre aucun ravitaillement, l’eau du lac étant suffisant bonne à mon goût. Tout se gâte, après 5 kilomètres, lorsque des kayakistes nous demandent d’abord, puis, nous oblige, à faire route à 45° pour rejoindre je vous le donne en mille, les autres nageurs. Donc nous devons nous détourner dans la route directe pour viser non pas un nouveau sommet ou point repérable mais des nageurs visiblement perdus, et pas du tout en direction de la plage d’arrivée à Evian. Voilà plusieurs minutes en effet que nous les rattrapions et les doublions ne distinguant à peine leurs bouées de sécurités et les bateaux qui les encadraient à près d’un kilomètre sur le côté. 

Nous finirons par nous exécuter après une discussion longue et virile, à contre coeur et nous perdons aussitôt le contact avec les deux autres nageurs qui étaient en tête avec nous mais, qui eux, échapperont à la patrouille, ne s’étant pas arrêtés au check point. Ils arriveront avec plus d’une demie heure d’avance sur nous qui avons nagé plus de 15km au total, en doublant pendant 3km des paquets de nageurs épuisés partis 2 heures avant nous, en brasse parfois, déshydratés et perdus probablement, hagards à coup sûr.

Dans la direction dans laquelle nous allions, il nous était impossible de nous diriger car les diapositives ne nous étaient, maintenant, d’aucun secours. Voilà pourquoi, notre duo décidait vers le huit ou neuvième kilomètre de se réorienter et de quitter cette farandole. Nous partirons sans être rappelé à l’ordre par le sous officier kayakiste car personne ne notera notre dérive discrète et volontaire, et nous nagerons ainsi jusqu’au douzième kilomètre où un bateau vient nous proposer un ravitaillement bienvenu et nous confirmer que nous sommes enfin dans la bonne direction à la différence du peloton que nous avons fui.

J’aurais pu comprendre de rallonger la distance pour arriver en même temps que les derniers, une fois de plus ça n’était pas une course. Voire pour ramener d’autres nageurs ou pour des raisons de sécurité réelles en cas de mauvais temps ou visibilité. Mais dans le cas présent la mise en « danger » du moins en difficulté venait de ces équipes qui avouaient ne pas savoir où était l’arrivée et s’acharnaient à faire progresser les nageurs les uns derrière les autres sans se soucier de l’état de fatigue et de la démoralisation qui allait résulter de cette dérive. Ils auraient pu comprendre que nous allions dans la bonne direction et dès lors, comme nous le proposions, de ramener avec nous les nageurs dans le bon axe.

Ma trace avec la belle déviation au kilomètre 7 pour « rejoindre » les nageurs plus lents sur la mauvaise trace

L’arrivée se jouera au sprint juste pour le principe et la suite sera aussi très rapide car nous sommes mis au régime pain sec et eau. Ce n’est pas faute d’avoir fini dans les premiers mais ça ressemble à une sortie de l’eau en 3h après un 10km en coupe de France où il n’y a plus rien à manger. Et comme en Italie, nous trouverons refuge dans une pizzeria

Ici plusieurs choses auraient du m’alerter, le prix encore très élevé pour un 13km en lac, la présence de trop nombreux triathlètes en néoprène malgré une température dans et hors de l’eau très élevée, donc une absence de réglementation et une organisation qui semble faire du team building plutôt qu’une traversée. À tel point que l’organisation me classera longtemps comme ayant nagé en combinaison tellement le fait de nager ne tissu leur paraissait étrange. 

Les diapositives et la fameuse croyance dans les « kayaks » pour se diriger dans l’eau alors qu’eux ne sont là que pour « sécuriser » la course. Bien souvent cet acteur des courses d’eau libre est assez proche du bénévole en ultra trail qui vous lance : « 200m de côte encore et après ça ne fait que descendre ». Quand, en réalité, il va falloir encore gravir un col pendant plus d’une heure et qu’on a déjà 70km dans les jambes. 

Pour revenir au Léman, le cadre est joli, l’eau est superbe, la ville d’arrivée sympathique, la météo était parfaite, et les nageurs de mon groupe bienveillants, pour le reste ça n’a rien à voir avec de l’eau libre.

Une course d’eau libre ça devrait ressembler à cela, pas de néoprène, un transporteur au bras, de la bagarre en respectant les autres nageurs et les règlements.

Car le point doit maintenant être abordé : de quoi l’eau libre est elle le nom? 

Est-elle une sous discipline, trop exigeante qui doit se niveler par le bas en se mélangeant avec des triathlètes en néoprène et armés de montres gps voire de plaquettes à l’avenir? Doit on obligatoirement nommer une épreuve d’eau libre défi ou challenge, faire de la distance un but en soi et ouvrir l’inscription à tous les licenciés d’un autre sport. Un peu comme si une épreuve de vélo de montagne devait se transformer en épreuve majoritairement sur asphalte car des cyclistes sur route ou pire en gravel voudraient y participer.

Au sein de la FFN si l’on a une licence eau libre on ne peut pas prendre part à des compétitions en bassin mais une licence FFTri permet par contre de nager en eau libre en compétition au moins au niveau coupe de France qui devrait être un circuit favorisant les clubs et les nageurs engagés dans cette discipline.

Si cette dernière ne respecte en rien les règles qui ont construit son image, son esprit et celui des participants qui se reconnaissent dans cette communauté alors elle n’a pas d’avenir et à défaut de se développer va disparaitre en proposant une longue distance de 3.8km comme en triathlon lors d’un Ironman®. Des épreuves sous licence privées ou des disciplines plus « fun » comme le triathlon, le swim-run ou le sauvetage côtier finiront par l’emporter sur l’eau libre dont le nom sera alors utilisé comme un sous produit d’un autre sport en ayant perdu notre identité.

Et c’est ainsi que nous arrivons à notre dernière épreuve catastrophe qui s’était tenue un an auparavant et qui est emblématique de cette dérive.

Existe il des critères objectifs qui définissent une mauvaise compétition? 1/3

Ou comment reconnaitre et ne plus participer à des compétitions d’eau libre qui n’en sont pas.

Car à défaut de terminer systématiquement sur un podium, dans les points, ou, au sprint à la fin d’un 10km, la plupart d’entre nous désire souvent, assez simplement, pratiquer son sport en bonne compagnie et en sécurité dans un lieu agréable et y avoir des échanges et des sensations propres à notre discipline. 

La pratique en compétition de l’eau libre c’est plus souvent cela que la performance pure mais, à son niveau, chacun espère simplement aussi progresser, allonger la distance, nager plus vite, dans de l’eau plus froide, nager sans artifice ou dans des conditions plus difficiles ou dans un cadre impossible à nager hors d’une organisation. Et avoir pu programmer sa saison avec une ou plusieurs épreuves reste une manière de se motiver pour continuer à s’entrainer. 

Pourtant il n’est pas rare de revenir déçu, et plus encore, d’un déplacement à plus de 300km de chez soi, par un certain nombre de facteurs qui transforme un 5km dans un lac en un  « mauvais » remake de « La créature du Lac Noir ». 

Les raisons de cette débâcle ne sont pas forcément à chercher dans la mauvaise forme du jour mais plutôt dans des critères structurels que l’on aurait pu deviner facilement lors de l’inscription tellement une mauvaise compétition se renifle d’assez loin.

Voilà donc une méthode (quasi parfaite) afin de détecter les bonnes et les mauvaises compétitions :

Par soucis d’honnêteté je citerai de vraies compétitions, 3 en l’occurence, auxquelles j’ai participé et bien sûr j’incite les organisateurs en question qui se sentiraient vexés par mes commentaires à me contacter car les colonnes de ce site leurs sont aussi ouvertes s’ils veulent me contredire et enrichir cordialement le débat.

La seconde partie de cet article traitera de compétitions que je recommande vivement (pour finir sur une note positive) sans pour autant avoir un quelconque intérêt commercial à le faire, car je paye chacune de mes inscriptions et je n’organise aucun de ces évènements.

•Capri Napoli 

La plage de départ où règnent les sponsors et la confusion comme l’absence de toilettes

Par ordre chronologique dans notre calendrier débutons avec la plus difficile en terme de distance  mais aussi d’inscription : Capri-Napoli. 

L’un des plus anciens marathon en eau libre en Europe car la première édition date de 1949 entre deux nageurs italiens qui bouclèrent la traversée de 36km (nous reviendrons sur ce point de détail plus tard) en 12 heures. De simple défi elle devient une course, à partir de 1954, quand son organisation dépendra du journal napolitain « Il Mattino ». Ce dernier reparait en effet dans les kiosques depuis quatre ans après son interdiction en 1943 pour connivences avec le régime fasciste.  

Bref, jusqu’en 1993 la course va faire du Golfe de Naples l’un des hauts lieux de notre discipline. Mais elle va alors connaitre un arrêt de dix ans et sera à nouveau reprise en main en 2003 notamment par Luciano Cotena, qui, s’il est nageur et président du club Napoli Aquatica n’en reste pas moins un spécialiste du marketing.

La traversée « open » qui n’est pas la compétition de haut niveau de la FINA, se déroule entre juin et juillet. Elle nécessite un prix d’entrée qui se calcule en centaines d’euros et pour moi qui l’ai faite en Duo (comprendre en relais de 2, ils sont possible jusqu’à 6 nageurs) il fallait compter 500€ par nageur et un tarif « préférentiel » dans un hôtel de son choix, comprendre un à Naples, l’autre à Capri. À ce propos oubliez de suite le charme du bord de mer si vous choisissez l’hôtel proposé ce sera loin du centre et loin de tout avec certes une piscine à votre disposition mais c’est un bassin de 20m maximum, en d’autres termes une piscine d’hôtel.

C’est là qu’aura lieu le briefing la veille de la course (c’est un moment crucial pour juger du sérieux d’un organisateur). 

Première mauvaise nouvelle, les pilotes sont absents de la réunion et aucun point n’aborde la navigation si ce n’est 3 ou 4 diapositives présentant des photographies prises depuis un bateau depuis le départ puis à 20, 10 et 5 km du point d’arrivée. On nous parle d’une course de 36km où l’on est libre donc de faire sa propre route sans avoir un point de passage obligatoire. Se pose alors le double problème, que la distance à vol d’oiseau entre les deux points fait à peine 32km et non pas 36 comme annoncé d’une part et qu’il semblerait que c’est au nageur de faire sa route depuis le niveau zéro (la tête hors de l’eau) car le pilote lui n’est pas là pour cela.

Parlons d’abord du kilométrage annoncé, car il s’agit là d’un critère commun aux mauvaises compétition quand l’organisateur se moque déjà de la distance en l’arrondissant plutôt à la hausse, histoire de flatter votre ego et gonfler la facture. Mais il s’agira tout de même de terminer les 32km car les règles absurdes d’une part et les moyens à votre disposition rendront la quête quasi impossible même à de très bons nageurs. 

Au départ avec le bonnet du club car l’organisation n’en fournit pas un en souvenir, peut être à raison?

En effet, une barrière horaire de 10h vient tel un couperet sortir les nageurs quelles que soient les conditions météo, favorables ou non. Il n’est pas facile de nager à cette allure un 10km contre du vent et des vagues alors plus du triple je vous laisse imaginer la dérive possible.

Mais c’est aussi et surtout parce que le pilote de votre bateau ne vous sera d’aucun secours d’abord parce que pour vous alimenter ou vous piloter tout simplement il vous faudra « un coach » que vous pouvez « louer » à l’organisation, mais ne comptez par sur le « capitaine » du bateau qui dispose tout juste d’un permis côtier mais ni de GPS, ou de Radio VHF et pas non plus de Compas. Pas facile dans ces conditions de garder un cap, et, si jamais le brouillard devait se lever ou la visibilité baisser il serait tout simplement impossible de terminer ou d’être en sécurité sur l’eau. 

En France pour comparaison en semi hauturier (6 à 60 milles d’un abri) les cartes marines et un GPS ainsi qu’une VHF sont obligatoire. Au départ de Capri le point que vous visez est donc à plus de trente kilomètre dans le Golfe et la moindre houle au niveau zéro vous empêchera de voir quoi que ce soit devant vous sur plus des deux premiers tiers du parcours. 

À noter qu’au départ un bateau me coupera la route et manquera de me passer sur le corps en me reprochant de ne pas être près de mon embarcation qui de toute façon n’est pas arrivée.  À juste titre, mon pilote et moi même pensions que les départs étaient différés entre les solos, les duos et les relais. En réalité non, tout le monde part en même temps sans tenir compte du briefing, on sent qu’on est poussé vers l’arrivée et que la journée va être longue.  

Car pour le coup vous risquez de nager 36km sans jamais arriver à destination. Pour votre salut de toute façon après 09h30 de nage si vous n’êtes pas sur le point de toucher terre l’organisation vous sortira de l’eau même à 2km et quelques de l’arrivée. L’important parait être de finir à l’heure pour être tous ensemble pour le « Podium ». 

Et à terre rien ne vous sera épargné, une remise de prix, une médaille et un diplôme, même si vous n’avez pas bouclé la distance. Mais pas de ravitaillement, à part de l’alcool et un bout de pizza froide qui était là presque par hasard. Le bus qui doit vous ramener à votre hôtel si lointain ne viendra pas non plus, mais c’est l’occasion de prendre un taxi avec vos compagnons de galère et de finir dans un restaurant digne de ce nom en se promettant de ne plus jamais revenir sauf pour des vacances, la ville et les habitants en valent largement la peine.

Mon acolyte dans cette galère sans lui je ne serai ni parti, ni arrivé

Donc nous aurons appris que si le spécialiste du marketing prend le dessus sur le nageur l’organisation risque de vous vendre du rêve ou du cauchemar selon que vous pourrez où non vous targuer le lundi matin à la machine à café d’avoir pu terminer cette pourtant belle et mythique traversée. Prix excessif, distance au pif, pilote absent et donc sécurité sur l’eau et respect du règlement à l’occasion, zéro ravitaillement après 9h30 dans l’eau, en font la pire course que j’ai pu faire et de loin, pourtant un lieu magnifique et heureusement pour moi un duo avec mon acolyte, toujours souriant Bernard-Pierre qui fut un très bon compagnon en pleine mer notamment pour faire le point et terminer cette course en 9h31.

La plupart en solo n’arriveront pas à boucler cette traversée car le temps limite, fixe, n’est pas adapté aux conditions du jour, changeantes. Et la dérive possible par le manque d’instrument induit souvent un détour comme le prouve les traces trouvées ici et là, y compris les jours où la course des pros est interrompue. Le Golfe de Napoli est assez capricieux à nager en effet la houle et le vent sont souvent présents, mais si une autre organisation prenait la main sur cette traversée à n’en pas douter je tenterais l’expérience en solo sans cette barrière horaires sortie de nulle part.

Frédéric Romera un excellent nageur français qui a pourtant eu le plus grand mal à terminer. Notez le grand nombre de sponsors de cette épreuve

Résumons les éléments largement défavorables à cette traversée :

•D’abord le prix de plusieurs centaines d’euros pour nager sans pilote, ni instrument. 

•La distance annoncée largement estimée à la hausse.

•L’absence de nourriture et de juge arbitre à bord de chaque bateau pourtant inclus dans le prix et le règlement.

•L’utilisation par certains de néoprène malgré une interdiction justifiée par une température très élevée.

•Le non respect des consignes notamment au départ

•L’absence de toilettes au départ et de test anti dopage à l’arrivée malgré le prix d’inscription 

•Enfin aucune bienveillance et de professionnalisme de la part d’organisateurs qui ignorent la réalité d’une traversée pour des nageurs amateurs en fixant un temps limite 10h. 

La course des professionnels en 2022 arrêtée dans des conditions discutables comme le classement qui en découle

En 2022 rares sont les nageurs ayant pu terminer la course. Ainsi le 08 juillet, 25 nageurs sont arrêtés/retirés bref ne terminent pas quand seul, un duo touche le sable après 09h27 de nage, alors que déjà le 24 juin, 24 nageurs n’avaient pas terminés non plus dont certains pourtant aguerris et bons nageurs furent arrêtés très proche de l’arche finale. Statistiquement vous ne terminerez pas cette course dans ces conditions.

A noter que l’organisation de la course élite fut un désastre en 2022 où une fois de plus les nageurs furent tous arrêtés avant la mi-course. Et malgré à peine 4 heures de nage, l’organisation va établir un classement où comme un hasard 5 nageurs italiens vont terminer aux 5 premières places

Dans le prochain billet nous verrons qu’une traversée de lac peut aussi se transformer en une aventure voire un naufrage pour certains, mais pas pour l’organisation.