Le mot d’excuse, où comment passer à côté de son entrainement ou de sa course.

Pour faire suite au précédent article sur la distance marathon en eau libre mais aussi pour faire écho à de nombreux récits d’athlètes amateurs de toutes disciplines nous allons aborder cette fois la façon dont on peut auto-brider sa performance, ou, pour se rassurer pour le jour J accumuler paradoxalement bon nombre d’erreurs à l’entrainement en pensant bien faire.

il serait utile de débuter, ici, par les entrainements et faire d’abord une liste des fausses raisons (pas exhaustives malheureusement) qui reviennent très (trop) souvent dans la bouche des athlètes de tous niveaux. Puis de s’attaquer aux grandes erreurs que les athlètes mettent en place pour palier à ce manque de confiance dans un entrainement spécifique et qui, de fait, vont saboter toute ou partie de leur performance le jour J.

S’il s’agit de traiter de question psychologique, il ne s’agit pas de décortiquer le mental de chaque athlète mais bien les réponses du type « je ne peux pas » lorsqu’il lui sera proposé un entrainement relativement difficile qui le ferait progresser. On peut imaginer ici des fractionnés en grand nombre ou des vitesses élevées, peut importe à condition que la réponse de l’athlète soit un évitement de cette session.

Dès lors, la première excuse est, justement,  la trop grande difficulté, a priori, d’une session d’entrainement qui pourtant suit une certaine logique de progression dans la préparation et permettra d’aller plus vite lors des compétitions à venir. Mais l’athlète se bloque face au menu de la session et se définit comme incapable de réaliser un exercice qui serait dès lors, hors de propos.

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Cette excuse vient souvent s’accoler au fait de n’avoir jamais fait ce type d’entrainement avant, car l’athlète qui doute peut être très conservateur, dans le but de se rassurer, et il veut bien innover mais uniquement si tous les réseaux sociaux parle d’une nouvelle technique qui fête pourtant souvent ces 20 ans.

Donc, tant qu’il ne l’a pas fait avant il est souvent difficile de faire faire une session spécifique sans créer des réticences chez le sujet pourtant déjà suffisamment entrainé et près pour passer un nouveau cap. Mais comment progresser grâce aux sessions déjà traditionnelles qui souvent touchent leurs limites? L’athlète ne se pose pas ce type de question il pense qu’il peut le faire en suivant un plan commun, une nouveauté de 20 ans totalement inutile ou anachronique, voire en répétant sans cesse les étapes précédentes. S’il fallait appliquer cette « méthodologie » à tous les apprentissages de la vie on progresserait peu.

Vient ensuite une série de deux excuses qui, à nouveau, s’entremêlent, à savoir que l’athlète pense déjà en faire beaucoup mais aussi que cela pourrait nuire à sa technique car il ne serait pas capable de se concentrer sur celle-ci durant un entrainement aussi exigeant. La nouveauté serait indigeste voire contre-productive.

Voilà encore une manière de trouver des excuses pour ne pas se confronter, pourtant sans dossard et juste avec le chronomètre comme juge et soi même comme seul spectateur, à une « nouvelle » méthodologie, du moins à un exercice qui va sûrement permettre de développer quelques qualités de vitesse ou de maintien. Il y a pourtant peu de risque sur le papier.

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On en vient alors à notre second problème, celui de l’entrainement à la distance ou sur le parcours. Car évitant de se mettre à l’entrainement dans un certain inconfort et en « danger » par rapport à des normes qu’il a pu lire ici ou là, l’athlète va choisir de s’entrainer à la distance qu’il doit courir ou nager ou rouler le jour J, histoire de se rassurer. La variante à cela étant de vouloir faire la course avant la course sur le même parcours et à la vitesse donnée, en espérant ainsi maitriser sa performance lors de l’épreuve.

Voilà deux faces d’une même pièce, qui représentent bien une faille mentale qui entraine une défaillance dans l’entrainement et qui provoque une contre performance en compétition.

Dès que l’on aborde la partie mentale dans la réussite d’un sport qu’il soit d’endurance ou de vitesse pure on évalue son importance à une part largement majoritaire dans le succès ou dans l’échec. Et l’on peut souscrire à cette hypothèse que l’entrainement quotidien devrait aussi aborder la part psychologique du sport et de l’effort que l’athlète doit endurer.

Pourtant à vouloir se rassurer ou ne pas oser se confronter à des sessions dédiées l’athlète qu’il soit un nageur de 100m en bassin, un compétiteur en eau libre qui devrait se lancer sur 10km ou un marathonien sur route, rate bien souvent sa course lorsqu’il entame sa phrase par : « je ne peux pas » quelque soit l’excuse qui viendra appuyer sa capitulation.

Pire encore il viendra ruiner tous ses espoirs en voulant répéter sans cesse des exercices ou des distances qui le rassure mais ne le font pas progresser. Combien de coureurs de marathon arrivent cramer le matin d’un 42,2 km faute d’avoir couru deux ou trois fois cette distance, ou presque, les semaines précédentes en pensant bien faire. Ici le mental n’y pourra rien car les conditions de course ne seront pas les mêmes et la pression souvent trop importante pour que l’on puisse reproduire à Berlin, Paris ou New York ce que l’on faisait le dimanche matin dans la sortie trop longue. Et de toute façon, le manque de fraicheur fera le reste. Dans le meilleur des cas l’athlète n’ayant plus réellement travaillé la vitesse mais uniquement la distance aura une performance relativement médiocre car il lui manquera de jus pour progresser encore et toujours.

La prochaine fois que vous lisez votre plan ne sabotez pas vous même la suite du programme, ça peut tuer toutes vos ambitions qui pourtant vous motivent chaque matin pour aller vous entrainer.

Lancez vous et « je ne peux pas » n’est pas une option, essayez, tentez, relativisez et attaquer, laissez vos doutes dans la zone de confort et oubliez les si vous souhaitez passer une barrière.

Préparer sa première longue distance en eau libre

Lors de mes participations à des épreuves notamment de coupe de France ou autres évènements franchisés comme l’excellent Open Swim Stars  (qui cette année propose des 10km), l’Eurasia Swim cup ou OceanMan, il n’est pas rare qu’ayant choisi le plus longue distance possible, ce qui rime avec 10km, car le 25km est absent des tablettes à mon grand regret (sauf au championnats de France élite), il n’est pas rare que des nageurs participant régulièrement à des 5km viennent me questionner à propos de la distance marathon.

La grande majorité doute de la faisabilité et bien souvent ne s’inscrit même pas à des combinés sur un ou deux jours (par exemple un 5km le samedi et un 2km le dimanche matin) pensant ne pas avoir les bras.

Alors certes les 10km ne sont pas légions mais on en trouve tout de même un peu partout en France, mais pas en mer malheureusement, et, si parfois il est nécessaire de pouvoir terminer dans un temps limite (3h) voire de justifier d’un chrono sur la distance dans l’année, bien des 10km sont en fait ouverts à tous mais ne font pourtant pas recette, du fait j’en suis sûr que la distance effraie.

Il s’agit techniquement d’un marathon en eau libre (4km en courant=1km en nageant) et lorsque l’on voit l’engouement pour les courses de 42km partout dans le monde, les nageurs du dimanche devraient rêver de se lancer un jour sur un 10km. La réalité est toute autre, cette discipline qui pourtant connait un essor non négligeable notamment grâce à des franchises qui permettent de nager au coeur des villes ou à des épreuves mythiques (défi Monte Cristo) fait encore peur à bien des pratiquants qui avec un niveau d’entrainement équivalent en course à pieds feraient le marathon de Paris un jour ou l’autre après avoir validé un ou deux semi (notre 5km en eau libre).

Il y a une frontière que de trop nombreux nageurs n’osent pas franchir alors même qu’il n’est pas impossible de nager 3h (soit 1’47 au 100m parfois en combinaison Néoprène) avec des ravitaillements, lorsque l’on nage 3 à 4 fois par semaine en club ou en solo des sessions de 1 h à 1h30.

Ce blog, s’il doit avoir une vocation est bien celle de donner envie, et quelques ressources, afin que des lecteurs/nageurs se lancent sur des épreuves atypiques ou qui leurs semblaient hors de portée. Pour cela voilà quelques clés pour réussir son premier longue distance sans exploser en route ni lors de la compétition ni lors de l’entrainement.

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Tout d’abord évaluer son niveau de nage de manière un temps soit peu honnête, avec un vrai chrono sur 500m et un oeil extérieur pour se donner une idée des points à travailler et des vitesses que l’on devra viser au fur et à mesure de l’année. Mais que pour enchainer les sessions et les kilomètres il ne faudra pas se blesser non plus et donc avoir un style le plus correct possible.

Il faudra aussi s’y prendre suffisamment à l’avance, le fait que je poste ce billet en début d’année laisse entendre qu’il faudra 5 à 6 mois pour se préparer sans se cramer ou se dégouter en cours de route, car oui, il y aura une hausse du volume ou une hausse de l’intensité parfois.

Une fois muni d’un chrono de référence sur 100m et sur 500m (ou 400m pour ceux et celles qui nageraient à presque 2’ au 100m car on vise un effort de 7 à 8 minutes) il faudra calculer votre indice de déperdition à savoir, le coefficient multiplicateur entre votre temps sur 100 et sur 500m qui doit se situer aussi proche que possible de 1.06 pour les meilleurs.

Vous voyez que je ne parle pas de chronos impossibles à atteindre sur 100m mais d’un temps sur 500m qui soit assez proche en moyenne par 100m du 100m de référence en sprint. Le tout n’est pas forcément d’être rapide mais plutôt constant et endurant.

Prenons l’exemple d’un nageur ayant réalisé un 100m en 1’20 et qui mettra 7’46 sur le 500m soit un indice de 1.09 s’il avait pu tenir un indice de 1.06 il aurait terminé en 7’21, ce qui semble être son meilleur temps possible.

Attention à ne pas avoir, quelque soit son temps de base, un indice trop élevé qui serait synonyme de grand ralentissement plus la distance s’allonge et donc d’un 10km vraiment trop dur à finir. Attention aussi à bien prendre en compte deux notions importantes celle de la relance au virage qui avec une très bonne culbute vient un peu fausser le résultat d’un nageur qui sera peut être un peu plus lent en eau libre, ou, à l’inverse, un nageur virant moins aisément qui sera peut être favorisé en ligne droite pour une même distance (et je ne parle pas ici de la navigation, de l’eau salée ou pas, ou de la combinaison qui viennent perturber le nageur le jour J).

Mais l’exemple précédent n’étant peut être pas à la portée de tous je maintiens mon propos un nageur faisant 1’35 au 100m ou plus à condition qu’il soit capable de maintenir une grand partie de cette vitesse de pointe sur 500m et obtenir ainsi un indice assez réduit 1.10 au maximum pourra se lancer sur le marathon en suivant quelques règles utiles jusqu’au jour J, disons dans 4 à 6 mois.

Marathon Swimming - Olympics: Day 10
RIO DE JANEIRO, BRAZIL – AUGUST 15: The competitors swim in the Women’s 10km Marathon Swimming on day 10 of the Rio 2016 Olympic Games at Fort Copacabana on August 15, 2016 in Rio de Janeiro, Brazil. (Photo by Clive Rose/Getty Images)

D’abord, en divisant la période d’entrainement restant en 3 grandes sections :

La première consacrée à la technique (quoi que cela soit être une constante) et à l’endurance.

La deuxième à la vitesse sur des fractionnés un peu plus long à chaque fois.

Et la troisième à la cadence (le rythme de course).

En jouant sur des sessions qui vont travailler les points faibles notre nageur ayant fait 3 à 4 séances par semaine, dont une un peu plus longue parfois (ou deux sessions dans la journée quand c’est possible) sera prêt le jour de son marathon. Il faudra aussi alterner des éducatifs, de la vitesse notamment pour rompre les volumes importants tout en pratiquant les 4 nages et, le tour sera joué. Car il est important de ne pas chercher à nager 10km à chaque session mais à mieux nager, plus vite et plus longtemps et là les éducatifs et les autres nages sont de précieux atouts.

Avec un volume de 15 km et plus par semaine en moyenne un nageur qui travaillera ses points faibles et notamment la partie eau libre si cela lui pose problème (navigation, aisance dans le milieu naturel…) sera en capacité de finir correctement son premier 10km aidé le jour j par un ravitailleur qui lui tendra une perche et de précieux conseils pour le garder hydraté et motivé. Je reviendrai vite sur la partie hydratation et nutrition pour le 10km car là aussi il y a des erreurs à éviter.

En espérant que l’on soit plus nombreux encore aux départs des 10km cette saison, le premier pour moi aura lieu en mars pour bien attaquer la saison.

Un autre moment clé de la préparation : le petit déjeuner.

Sans être aucunement médecin, diététicien ou nutritionniste je ne souhaite pas ici édicter autre chose qu’une méthodologie de bon sens, partant du principe que le petit déjeuner doit représenter 25 à 30% des apports caloriques d’une journée normale il parait évident que l’on ne peut pas se passer d’un tel apport dans la journée d’un sportif pratiquant 10 à 20 heures d’entrainement hebdomadaire.

Pour cela il devrait se composer forcément de plusieurs boissons, de l’eau pour réhydrater après une longue nuit, un jus de fruit pourquoi pas mais plutôt en milieu ou fin de déjeuner pour ne pas trop acidifier l’estomac et d’une boisson chaude au choix. À cela on peut rajouter un produit laitier et un produit céréalier pour les glucides complexes qui vont donner de l’énergie au fur et à mesure de la matinée. Attention toutefois lorsque l’on nage en mer après il parfois difficile de ne pas avoir la nausée. Un apport en acides gras essentiel et de la vitamine A et E pour les tissus musculaires et pour cela le beurre reste excellent, enfin un produit sucré comme du miel ou de la confiture.

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Voilà donc pour le contenu maintenant il faut définir le moment d’ingestion de ce premier repas de la journée. Ici s’affrontent 3 écoles :

Débutons par celle qui me parait la moins naturelle et qui consiste à partir à jeun elle engendre une fatigue musculaire plus importante que la même activité post-prandiale. Certains peuvent y trouver un moyen de perdre du poids quand certaines études démontrent que c’est l’inverse qui peut se produire. Il s’agit certes d’un excellent réveil musculaire mais cette pratique nécessite une grande attention, de boire suffisamment et de faire aussi une croix sur des sorties longues ou intenses. Ensuite on se posera la question de la préparation en vue d’une compétition où il faudra ce jour là avaler un petit déjeuner sans jamais s’y être habitué.

À quelques jours du début du mois de Ramadan nous n’aborderons pas ici la pratique  intense du sport sans aucun apport qui mérite un article complet plus détaillé.

On trouve de nombreux partisans du 50/50 qui consiste à ingérer une partie légère du petit déjeuner avant et une autre juste après l’effort. Sur le plan des apports calorifiques rien à redire mais reste la question de la préparation aux compétitions longues qui nécessiteront elles de partir avec un peu plus de carburant dans le ventre.

On s’en explique avec la méthode qui consiste à prendre l’intégral du menu en une fois au réveil. Les avantages sont nombreux; le rythme digestif est calé, la journée est lancée et après l’entrainement matinal, on peut passer à sa journée professionnelle sans avoir à repasser par la case pieds sous la table. Que l’on soit en compétition ou non le corps est habitué à ingérer ce quart ou plus d’apport calorique, c’est un point important, il s’agit d’un entrainement aussi.

Il n’est pas rare qu’un coureur ou triathlète se plaigne de troubles digestifs suite à la prise d’un gel ou autre que son estomac refuse d’ingérer. Comme expliqué plus haut il faut avant tout entrainer son corps à ce rythme et aux produits que l’on donnera pendant ou avant un effort. Ne jamais improviser le jour d’une course et ne jamais changer ce rythme non plus, il est déjà bien suffisant d’avoir voyagé en avion (simulant une altitude de 2000m et plus pendant plusieurs heures qu’il faudra compenser par un apport en eau important)

Reste la question du temps de latence entre l’ingestion et le début de la pratique sportive (notamment en cas de compétition), s’il faut compter presque 3 heures pour profiter de cet apport certains produits industriels proposent de réduire ce délai à presque 1h30 via des préparations en poudre qui termine en gateau sport. Cela permet certes de rallonger la nuit avant la compétition et d’ingérer un produit modifié et transformé industriellement (on est loin du bio) mais il faut aussi avoir testé et ne pas improviser le jour d’une épreuve majeure. Mais il parait compliqué de passer d’une absence de petit déjeuner le matin sous prétexte que « cela ne passe pas » à avoir à ingérer un tel produit avant une distance marathon ou plus à 4 heures du matin dans un hotel le jour d’une course importante.

L’entrainement doit donc comporter aussi un volet nutrition et apporter des solutions adaptées à chaque discipline, en fonction de la durée de l’épreuve, du climat, des ravitaillements prévus par l’organisation ou encore des intolérances alimentaires.

Pour finir rappelons que pour un nageur en eau libre qui ne s’alimentera plus que par le biais de boissons sucrées en pleine mer, tendues par une perche depuis le bateau suiveur, il faudra aussi envisager de modifier son petit déjeuner pour être sûr de ne pas transformer cet apport essentiel en un problème de nausée qui pourrait limiter la performance.