Les premières études enregistrées sur les effets de l’immersion en eau froide sur le corps humain sont sans doute celles du Docteur James Currie qui n’avait pu sauver en décembre 1790 les passagers d’un voilier américain échoué en eau froide. Déjà en 450 av JC, Hérodote, relatant l’expédition du général Mardonius témoigne que « ceux qui ne savaient pas nager ont péri de noyade, les autres de froid ».
Et depuis si on comprend mieux les mécanismes et les enjeux d’un tel phénomène ils sont souvent ignorés de la plupart de nageurs ou des baigneurs. Voilà donc un petit rappel.
Tout d’abord, qu’est ce que le froid? On peut déterminer la température du corps qui sera bien souvent de 36.9°C avec une fluctuation selon l’heure de journée (au plus chaud à 18h et au plus froid à 4h du matin) et surtout une fluctuation en fonction de la méthode de prise de température., tout ce qui va faire baisser celle-ci est donc du froid.
La méthode de prise de température en elle même est primordiale car elle ne sera pas la même en rectale, buccale ou sous l’aisselle voire sur le front, donc il faut privilégier la prise à l’aide d’une thermomètre médical et sur une durée de 3 à 5 minutes pour obtenir un chiffre réel et donc définir si l’on a chaud ou froid.
Une fois notre corps plongé dans l’eau froide celui-ci va connaitre deux mécanismes biologiques, celui de l’augmentation de la production de chaleur d’une part, et d’accroissement de l’isolement thermique du corps d’autre part.
Le premier phénomène d’augmentation de production de chaleur est obtenu par contraction musculaire mais celle-ci peut être volontaire ou involontaire.
La contraction musculaire à l’effort au cours de l’exercice va dégager de la puissance, ainsi au repos un homme de 70kg produit une puissance allant de 60 à 100 watts qui va être entièrement convertie en chaleur et lors d’un effort cela pourrait atteindre 1000 à 1200 watts dont seulement 800 watts seront convertis en chaleur.
Enfin si on comprend bien ce qu’est la contraction volontaire on se souvient aussi qu’au contact du froid on frissonne et il s’agit là de la contraction involontaire. Elle est moins efficace car elle ne développe que 400 watts et surtout reste limitée dans le temps à 3 heures mais peut surtout mettre la personne en danger en l’empêchant d’avoir des gestes coordonnés (pour s’habiller, pour sortir de l’eau, pour tenir du matériel de secours ou passer un appel…)
Le second phénomène est celui de l’accroissement de l’isolement thermique qui est simplement la conséquence de la modification de la circulation sanguine dans la peau et le tissu sous cutané. Pour faire simple la plus grande partie de la chaleur corporelle est produite par le fonctionnement des organes et des muscles et celle-ci est distribuée vers la surface cutanée par le biais de la circulation sanguine. Mais sous l’effet du froid la circulation périphérique (comprendre l’envoi de sang vers les extrémités par exemple) peut être réduite par vasoconstriction des vaisseaux et fermeture des boucles capillaires cutanées afin de maintenir la chaleur dans le centre du corps et le cerveau (le maitre des lieux qui va toujours privilégier son propre confort).
Ainsi pour vous donner un ordre d’idée le débit sanguin normal de notre home de 70kg est de 20ml/minute en temps normal mais il peut être réduit à 1ml/minute et sa conductance thermique elle peut être divisée par 2 sous l’effet de la vasoconstriction.
Ici entre en scène le débat sur les différences de réaction au froid entre les individus et notamment l’importance du gras ou du poil pour mieux conserver la chaleur par rapport à un individu imberbe et maigre qui sera beaucoup moins tolérant.
Pour nous qui sommes exposés au froid de l’élément liquide il faut aussi prendre en compte notre refroidissement notamment à la sortie de l’eau du fait du vent qui va participer encore plus vite à celui-ci. Il faut donc s’isoler du froid ou éviter de s’y exposer ou de sortir de l’eau en pensant que ça ira mieux.
En sortant il faut se couvrir notamment la tête pour réchauffer le cerveau et ne pas oublier que 20% de la perte de chaleur se situe dans cette région et laisser le corps se réchauffer tout seul en évitant de toucher des objets chauds pour ne pas se bruler, ou ne pas provoquer un choc thermique en prenant une douche chaude. En cas de médicalisation on pourra respirer de l’oxygène réchauffée ou provoquer un réchauffement des organes grâce à des transfusions ou lavages. Mais on parle ici d’un corps qui serait déjà descendu très bas en température et qui dès lors ne serait pas en capacité de la faire remonter de lui même.